Les comportements répétitifs centrés sur le corps regroupent 3 troubles psychiques majeurs : la dermatillomanie, la trichotillomanie et l’onychophagie. Maltraiter sa peau, se ronger les ongles ou encore s’arracher les cheveux peut paraître insensé, et pourtant c’est un trouble à soigner. L’accompagnement des proches et des professionnels de santé est plébiscité. Comment identifier ces TOC ? Quels sont les symptômes, les causes et les facteurs de risque ? Découvrez comment les déceler, les freiner et les traiter : voici les recommandations de nos conseillers LaPrevention.fr.
Comprendre les comportements répétitifs centrés sur le corps (CRCC)
Qu’est-ce que la dermatillomanie, la trichotillomanie et l’onychophagie ?
Dermatillomanie : se gratter la peau de façon incontrôlée
La dermatillomanie se qualifie par un triturage pathologique de la peau. On cherche à gratter les irrégularités cutanées, percer les points noirs/boutons, arracher les croûtes… Seule, devant le miroir (ou non) et de façon ritualisée, la personne mal mène sa peau de manière incontrôlée, inconsciente. Toutes les zones du corps peuvent être inspectées en quête d’une imperfection à enlever.
Ce trouble touche 1,4% des adultes en France et commence fréquemment par une affection dermatologique telle que l’acné corporelle. Au moins ¾ des individus atteints sont des femmes et la dermatillomanie peut fluctuer en fonction du cycle menstruel.
Trichotillomanie : poils et cheveux arrachés
Le terme trichotillomanie vient des mots grecs “trich” pour cheveux, “tillo” pour tirer et “manie” pour frénésie. Ce comportement répétitif centré sur le corps touche 1 à 15 % de la population. Les personnes concernées s’arrachent de façon compulsive leurs propres cheveux, sourcils et cils, poils.
Onychophagie et onychotillomanie : ronger et maltraiter ses ongles
L’onychophagie désigne le fait de se ronger les ongles ou la peau autour et touche environ 30 % de la population. L’onychotillomanie amène les personnes à traumatiser leurs ongles de mains ou de pieds. Généralement, les individus repoussent ou enlèvent la cuticule et les petites peaux à l’aide d’autres ongles, des dents ou d’objets tranchants.
TOC : identifier les symptômes révélateurs de stress et d’anxiété
Comment ces troubles sont-ils diagnostiqués et quels sont les symptômes identifiés ?
Comportements répétitifs centrés sur le corps : un état de “semi-conscience”
Ce type de comportement induit un fort état de “semi-conscience”. Les personnes sont happées, presque en transe, de façon hypnotique, pouvant durer plusieurs minutes ou plusieurs heures. Ces comportements répétitifs centrés sur le corps peuvent même devenir addictifs, c’est un cercle vicieux.
Ils jouent un rôle de régulateur émotionnel dans la réduction du stress ou de tension jusqu’à la crise suivante. Ces états renforcent un sentiment de bien-être, de satisfaction et un apport sensoriel désirable. C’est comme s’apaiser et se détruire à la fois via un soulagement de s’être débarrassé de ses imperfections.
À savoir : les CRCC surviennent généralement lors des activités sédentaires (télévision, lecture, travail devant l’écran, téléphone, cinéma, transports en commun…).
Conséquences physiques de ces CRCC
Même si la personne se sent purifiée et débarrassée de ses défectuosités, voici les répercussions :
- lésions tissulaires, irritations
- infections cutanées, abcès
- cicatrices, trous dans la peau
- ongles incarnés et/ou déformés, problèmes bucco-dentaires
Que ce soit pour la peau, les ongles ou les poils, l’individu souhaite enlever ses impuretés, mais finalement il n’en fait que créer d’autres. En attaquant son corps, de nouvelles plaies sont formées. Certaines nécessitent même un traitement antibiotique voire une intervention chirurgicale pour les soigner.
L’impact psychologique de ces troubles psychiques
Ces gestes procurent une sensation de soulagement sur le moment et se font souvent dans un état dissociatif. Les personnes perdent la notion du temps et ce n’est qu’après leur crise qu’ils réalisent les dégâts. Un sentiment de honte survient. L’estime de soi en est entachée. D’autres troubles du comportement sont engendrés :
- phobies
- déprime voire la dépression
- rejet de soi
- addictions
- troubles obsessionnels compulsifs (TOC)
- troubles alimentaires
Troubles compulsifs et corps : les causes et facteurs de risque
Comment ces troubles psychologiques surviennent-ils ?
Origines psychologiques des CRCC
Comme une habitude psychologique, la personne suit un rituel apaisant. Ces mécanismes exutoires sont provoqués par des facteurs aggravants comme :
- l’anxiété, le stress
- un comportement perfectionniste “rien ne dépasse”, “rien n’obstrue”…
- une contrariété, des émotions négatives, les non-dits
- l’ennui, une sensation de vide
- la culpabilité, les tabous, la déception/honte de soi, manque d’affirmation
- suite à une maladie de peau, une blessure
- un sentiment de dégoût
- un traumatisme infantile, évènement marquant
CRCC : facteurs génétiques et prédispositions familiales
Les personnes présentant un trouble du comportement corporel répétitif ont des prédispositions familiales. On retrouve parfois les mêmes CRCC chez les parents, les actions de mimétisme sont ainsi liées. À la maison, on constate donc des attitudes similaires. Aucun rapport scientifique n’implique les gènes à ce jour, les études sont toujours en cours.
Facteurs environnementaux influant ces troubles du comportement
Comme dit plus tôt, la sphère familiale influe sur ces comportements. Les individus développent ces troubles à la suite de situations stressantes, un environnement pesant, voire maltraitant. Les CRCC peuvent être le résultat d’une colère refoulée et ressentie envers ses parents au moment de l’adolescence. Ils peuvent continuer à l’âge adulte, surtout s’ils ne sont pas diagnostiqués.
L’impact de ces troubles psychologiques sur la vie quotidienne
En quoi ces comportements affectent-ils les personnes et deviennent un handicap ?
Conséquences sociales et difficultés relationnelles
- isolement et anxiété sociale
- évitement de certaines sorties (piscine par exemple)
- difficultés relationnelles
- gêne dans la vie intime et sexuelle
Conséquences professionnelles et scolaires
- absences répétées
- retards réguliers
- perte de confiance en soi
- baisse de performance (angoisse, fatigue…)
Conséquences sur la santé mentale
- dépression
- culpabilité
- anxiété accrue
- sentiment d’échec, d’impuissance
Diagnostic, traitements et thérapies comportementales et cognitives
Quels sont les parcours de soins préconisés et les traitements plébiscités ?
Thérapies comportementales et cognitives (TCC)
Ces thérapies consistent à examiner les pensées et les émotions qui peuvent provoquer et alimenter des CRCC. L’objectif est de les déceler et de trouver les leviers psychologiques pour les dépasser et les soigner. L’intérêt est d’aider le patient à reconnaître les éléments déclencheurs et aussi à changer ses habitudes de vie. L’acceptation et l’engagement sont la clé.
Thérapies et médecines alternatives
Parmi les approches non conventionnelles, des thérapies alternatives (menées par des professionnels agréés) peuvent aider à se soigner. On retrouve par exemple :
- la sophrologie
- l’hypnose
- le mindfulness (la méditation en pleine conscience)
- la thérapie EMDR
Traitements médicamenteux
Dans le cadre du parcours de soins, et suite au diagnostic d’un professionnel de santé, un traitement médicamenteux peut être prescrit. Des antidépresseurs ou anxiolytiques sont ainsi proposés. Évidemment, les thérapies mentionnées précédemment ne sont pas à oublier : la santé mentale se soigne de façon pluridisciplinaire.
Prévention : conseils et gestion des symptômes
Quels sont les conseils préventifs pour freiner ces troubles centrés sur le corps ?
CRCC : prévention et psychoéducation
L’éducation et la sensibilisation sont les actions à privilégier. Il est essentiel d’en informer, d’en parler et d’alerter. Il est aussi important de souligner que les CRCC sont en fait très courants et que la personne atteinte n’est pas seule. Ces gestes impulsifs ne s’effacent pas du jour au lendemain. Faites preuve d’une approche positive et inconditionnelle : la patience, la délicatesse, la souplesse d’esprit et l’empathie sont requises.
Stratégies de gestion des symptômes
- tenir un journal de bord des comportements : identifier les situations qui déclenchent ses pratiques et utiliser des stratégies
- adopter des techniques de relaxation : yoga, méditation…
- utiliser un objet pour s’occuper les mains lors d’une activité sédentaire
- couvrir les miroirs, cacher les objets de manucure, se servir d’un vernis à ongles au goût amer
- trouver des moyens de stimuler les sens et réduire le besoin de faire le CRCC
- poser une main attentionnée et compréhensive lorsqu’elle se gratte ou ronge ses ongles, sans rien dire et sans jugement
Pour terminer, et aller plus loin sur le sujet, retrouvez toutes les ressources sur le site web de l’Association francophone des CRCC.
La dermatillomanie, la trichotillomanie et l’onychophagie sont des troubles psychiques invalidants. Leur impact sur la vie quotidienne est probant et les soigner est important. Pour gérer les symptômes et se tourner vers le traitement adapté, un diagnostic suivi d’une thérapie permet d’aller de l’avant. Compréhension, soutien et empathie encouragent aussi les bons comportements.